Haïti ne se limite pas à Port-au-Prince

Cet article est tiré du Cyber-bulletin 15.6 de Février 2025

En vue de se doter d’une nouvelle déclaration de la solidarité québécoise, l’Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI) a entrepris une série de consultations devant culminer par des états généraux du 4 au 6 juin prochains.

Les 7 et 16 janvier derniers, deux consultations ont porté plus particulièrement sur la coopération en Haïti.

La première pour entendre les organismes d’ici (dont l’AQANU) intervenant en Haïti, l’autre pour permettre aux partenaires haïtiens d’exprimer leurs besoins et attentes.

Les premiers ont fait part de leurs difficultés à maintenir leur aide en Haïti. Le climat d’insécurité du pays et l’apparente indifférence du gouvernement d’ici découragent les organisations. Les coopérants ne peuvent se rendre sur le terrain pour accompagner leurs partenaires haïtiens.

Leurs représentantes et représentants estiment qu’il faut mettre en valeur les actions solidaires en Haïti, démontrer qu’Haïti ne se limite pas qu’à sa capitale, Port-au-Prince, puisque, malgré tout, des projets se poursuivent dans des communautés locales.

Il a été question de «fédérer» les actions des organisations et celles de l’immense diaspora haïtienne, de mener des campagnes de sensibilisation et, bien sûr, de continuer à inciter le gouvernement canadien à prioriser l’aide humanitaire et d’appuyer les projets. L’AQOCI devrait aussi produire une cartographie des actions que mènent encore les organisations québécoises et canadiennes. On a souligné qu’une quarantaine d’organismes d’ici étaient présents en Haïti.

En mode écoute

Du côté des organisations haïtiennes (une dizaine y ont participé), leurs porte-parole s’attendent à ce que la coopération internationale s’appuie sur une approche participative, c’est-à-dire que les «bénéficiaires» puissent participer à toutes les étapes d’un projet, de son élaboration jusqu’à son évaluation.

Les partenaires haïtiens ne veulent pas de l’«assistanat» des organisations non gouvernementales (ONG), devenir leurs «élèves», devoir se plier à des cadres définis par les bailleurs de fonds.

Renforcer les capacités des jeunes et des femmes en agriculture constitue un des besoins des partenaires haïtiens.

 

Les ONG ne peuvent se substituer à l’État haïtien, malgré la faillite de ce dernier, a-t-on dit. «Nos institutions sont faibles, a-t-on également affirmé, aussi pourrait-on nous aider à renforcer les capacités et les compétences de nos dirigeants locaux.»

Ce mot de «renforcement» revient souvent dans la bouche des porte-parole haïtiens pour parler des capacités des jeunes, des femmes, de l’agriculture, des gens qui font du «business».

Un autre représentant a lancé un cri du cœur en parlant de l’absence d’un projet de société en Haïti, de l’instabilité et du manque d’intérêt des autorités haïtiennes pour les projets visant à mobiliser les jeunes. Il a espéré qu’émerge une «nouvelle génération d’hommes politiques».

Un autre a indiqué que l’actuelle crise permet de développer les régions et qu’il faut tenter d’y maintenir les jeunes. Fuyant Port-au-Prince, beaucoup d’entre eux se dirigent vers la République dominicaine où, pourtant, ils vivent de la maltraitance.

À l’une des trois questions posées par Denis Côté, animateur de la rencontre pour l’AQOCI, les Haïtiens n’ont pas identifié ce qui leur apparaît comme un «mauvais projet». L’un d’entre eux a cependant dit qu’au lendemain du tremblement de terre en janvier 2010, il y avait eu beaucoup d’aide internationale, mais qu’elle s’était soldée par des «résultats peu probants».

Des participants haïtiens ont également parlé du rôle important de la diaspora, espérant que certains membres reviennent travailler dans leur pays d’origine ou, tout au moins, qu’elle livre un plaidoyer auprès du gouvernement canadien. Les organismes haïtiens souhaitent un accompagnement politique.

On peut prendre connaissance de la démarche entreprise par l’AQOCI en vue de se doter d’une nouvelle déclaration de la solidarité québécoise.

https://aqoci.qc.ca/etats-generaux/

Hélène Ruel

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