L’École de formation professionnelle Mark Gallagher surplombe crise sociale, manifs et pandémie

Texte tiré du Cyber-bulletin 10.4 de l’AQANU

«Pays lock», manifestations, pandémie de coronavirus ont énormément perturbé l’année scolaire 2019-2020 en Haïti, de sorte que dans certaines écoles, l’année 2020-2021 n’est pas encore commencée. À juste titre, on peut parler de «plusieurs rentrées» cet automne, comme l’indique sœur Marie Mamoune Maurice. «Mais la majorité des écoles fonctionnent actuellement.»

Membre de la congrégation haïtienne des Petites sœurs de Sainte-Thérèse (PSST), sœur Mamoune a entrepris, l’an dernier, des études doctorales en éducation à l’Université Laval à Québec. C’est de sa chambre à la résidence de l’Université et par Zoom qu’on a pu réaliser l’entrevue.

Jusqu’à tout récemment, elle était responsable du réseau d’une trentaine d’écoles que gère sa communauté religieuse.

L’École de formation professionnelle Mark Gallagher est ouverte depuis 2014 à
Rivière-Froide en Haïti. (Photo AQANU)

Si elle est quasi confinée à Québec, l’«étudiante» comme elle se décrit demeure en étroite relation avec ses collègues, notamment celles de l’École de formation professionnelle Mark Gallagher (ÉFPMG).

Cette école a été ouverte en 2014, construite à Rivière-Froide grâce à une collaboration entre trois partenaires, les PSST, l’AQANU et les Friends of Mark Gallagher du Nouveau-Brunswick. Grâce à des subventions des gouvernements du Canada et du Nouveau-Brunswick (totalisant 1 million $), les trois partenaires ont amassé 500 000 $ de plus pour ce projet.

Le soutien de l’AQANU et des Friends

L’AQANU, les Friends of Mark Gallagher et la nouvelle association haïtienne des Amis de Mark Gallagher continuent de soutenir les élèves de l’école en finançant un programme de demi-bourses.

Les étudiantes de première année en secrétariat. Au total, elles étaient 41 inscrites en
2019-2020. (Photo ÉFPMG)

Sœur Mamoune explique que tous les élèves en technique agricole et en secrétariat bénéficient d’une demi-bourse, c’est-à-dire, une somme équivalant à la moitié de leurs frais d’inscription, 15 000 gourdes.

Au total, 65 bourses ont été attribuées pour l’année 2019-2020, dont 46 (20 étudiants, 26 étudiantes) à partir des contributions offertes par le Club des 100 de l’AQANU-Outaouais (4 765 $ US), l’association Friends of Mark Gallagher (1 434 $ US), l’association haïtienne des Amis de Mark Gallagher (45 000 gourdes) et de trois donateurs privés (745 $ US).

Sans en chiffrer le nombre, la majorité des étudiants n’ont pu acquitter leur dette (leur part de 15 000 gourdes) à l’égard de l’établissement.

Une rentrée en décembre

Ces jours-ci, les élèves de l’ÉFPMG s’apprêtent à boucler leur année scolaire 2019-2020 en subissant leurs examens finals, l’année 2020-2021 devant s’amorcer en décembre, alors que les inscriptions sont en cours. La rentrée est prévue pour décembre, après les examens de l’Institut national de la formation professionnelle pour les finissants (du 28 novembre au 4 décembre).

Tant pour les profs que pour les élèves, l’année 2019-2020 a été particulièrement laborieuse. Elle avait commencé avec un mois de retard en raison du «pays lock» et a été interrompue à deux reprises : en février, en raison de manifestations des policiers et de mars à août en raison de la pandémie.

Déperdition

Ces suspensions ont découragé des élèves à poursuivre leur parcours scolaire, surtout dans les filières de la cuisine/pâtisserie, de l’hôtellerie et de la construction/bâtiment. Tant et tant qu’on a dû fermer pour l’instant cette dernière filière, sept des 14 élèves inscrits ne s’étant pas présentés en août et cinq autres ont fini par fermer leur dossier. Leur enseignant a cependant gardé le contact avec plusieurs de ces élèves, espérant les voir de retour en classe.

Treize étudiantes et un étudiant avaient amorcé leurs études en cuisine et pâtisserie.
(Photo ÉFPMG)

Au total, 18% des 117 étudiantes et étudiants inscrits aux différents programmes de l’ÉFPMG en novembre 2019 ont abandonné leurs études. Ce phénomène de «déperdition» (décrochage) a aussi durement touché le programme cuisine et pâtisserie alors que 8 des treize élèves ont abandonné leur formation.

La cohorte d’élèves en hôtellerie et tourisme. (Photo ÉFPMG)

Les efforts des profs

Même s’ils n’ont pas été rémunérés entre avril et juillet, les profs ont multiplié les efforts pour «sauver» l’année scolaire, comme l’indique sœur Mamoune. L’ÉFPMG n’a toujours rien reçu du ministère de l’Éducation nationale lequel s’était engagé à verser une subvention aux écoles professionnelles du pays.

Les enseignants ont offert des cours en ligne, mais l’expérience s’est butée aux habituelles défaillances du Net en Haïti. Plusieurs stages n’ont pu avoir lieu, de sorte qu’on projette d’en organiser deux cette année pour les élèves de deuxième année en technique agricole. Un séminaire sur l’entrepreneuriat sera aussi organisé en novembre pour l’ensemble des étudiants de la première année.

Et la COVID-19

Enfin, l’École a bénéficié d’un projet visant la prévention de la contagion de la COVID-19 financé par l’AQANU-Outaouais.

L’argent versé pour deux écoles des PSST aura surtout servi à acquérir du matériel (seaux, poubelles, etc.) et des produits désinfectants pour le lavage des mains et le nettoyage des locaux.

Le décès en avril d’une étudiante en secrétariat n’était, finalement, pas attribuable au coronavirus comme cette éventualité avait été évoquée.

Pour ce qui concerne les masques, sœur Mamoune explique qu’on a dû abandonner cette consigne. «Le couvre-visage n’est pas une directive du gouvernement. Chaque école pouvait décider de l’imposer ou non. On en a fait la tentative dans les écoles primaires, sans vouloir l’imposer dans les écoles fréquentées par des adultes.» Le port du masque a rapidement été abandonné par les élèves. «Il fait chaud en Haïti!», souligne la religieuse.

La moitié des 14 étudiants inscrits au programme construction bâtiment ont troqué
leurs études contre un job. (Photo ÉFPMG

Quant au climat sociopolitique, il se serait quelque peu refroidi. Le calme est «apparent», notamment dans la zone de Martissant, répond sœur Mamoune tout en ajoutant qu’à n’importe lequel moment, il pourrait en être autrement.

Hélène Ruel

Ce contenu a été publié dans école de formation professionnelle Sgt. Mark gallagher, FMG, Haĩti, Rivière-Froide. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.